Témoignage Abibac (baccalauréat et Abitur), la vérité sinon rien !

Mes 3 années de lycée étant révolues, je peux -enfin- dire tout ce que je pense de la section Abibac. En effet, il existe peu de témoignages d’élèves sur Internet. Mais je tiens avant tout à préciser que je parle de mon cas, de mon lycée. Peut-être que pour d’autres personnes, dans d’autres établissements, les ressentis sont différents.

Très concrètement, la section Abibac, c’est quoi ?

Intégrer la filière

Pour entrer en Abibac, il y a une sélection. Mais cela doit dépendre des établissements. Pour ma promo, tous ceux qui ont postulé ont pu intégrer la section. Mais pour les promos suivantes, ce n’était plus le cas (trop de demandes).

Il faut aussi savoir que 2 élèves ont rejoint la classe en première : l’une avait séjourné 3 mois en Allemagne, la seconde était allemande.

De même, entrer en seconde en Abibac ne signifie pas que l’on va y rester tout au long de sa scolarité. Des élèves sont partis en fin de seconde, d’autres en fin de première. Certains se sont redirigés vers des classes euro allemand.

Les cours

En Abibac, on a beaucoup d’heures d’allemand. 6 h d’allemand et 5 h d’histoire géo en allemand par semaine (on n’a pas de cours d’histoire géo en français !).

Les heures d’allemand se décomposent en 5 h en classe entière et 1 h en module (en groupe, la moitié de la classe). Le même schéma pour l’histoire géo : 4 h en classe entière et 1 h de module.

Les autres cours sont les mêmes que dans un cursus normal. L’Abibac n’empêche pas de prendre une autre option. Par exemple, j’ai fait du latin pendant mes 3 années lycée, d’autres avaient une LV3 espagnol. En effet, si vous êtes en Abibac, l’anglais est la LV2 obligatoire !

Les Abibac de mon lycée étaient répartis dans 2 classes : pour la première et la terminale, une classe ES/L (ou L/ES ça revient au même) et une classe S. Nous pouvions nous diriger dans la filière de notre choix. Historiquement, dans mon établissement, au point de départ, l’Abibac était réservé aux S, puis il a été ouvert aux ES, et enfin aux L.

Et le contenu des cours ?

Les cours d’Allemand sont plus poussés. En seconde, on revoit grammaire, conjugaison, vocabulaire, etc. La première et la terminale sont consacrées à l’étude d’œuvres complètes en Allemand :  2 livres par année.

Les quatre livres que j’étais censée lire au cours des deux ans sont les suivants (je dis censée car au final je n’en ai terminé aucun…) :

Quelque soit la filière, le programme d’histoire est en gros celui des ES. Mais certains chapitres, comme la liberté de la presse, ne sont pas étudiés en Abibac. Ils sont remplacées par  d’autres chapitres propres à notre filière, comme les relations franco-allemandes.

Pour la géographie, je pense que le programme est le même qu’en ES (peut-être avec quelques points davantage axés sur l’Allemagne).

Les intérêts de la section Abibac ?

Les points vantés pour intégrer cette filière sont :

  • la délivrance simultanée du baccalauréat et de l’Abitur (l’équivalent allemand du bac)
  • un très bon niveau d’allemand : B2/C1 (en C1, on parle couramment Allemand, le C2 est le niveau maximal et correspond à la langue maternelle)
  • une bonne connaissance de l’Allemagne
    • civilisation
    • littérature
    • économie
    • institutions politiques et sociales
    • mentalités et modes de vie

Je les nuancerai par la suite.

Ce n’est pas trop difficile les cours en Abibac ?

Je vais être très franche, il faut bosser. Et parfois, les larmes viennent aux yeux (je peux vous assurer que je ne suis pas la seule à avoir pleuré à cause de la charge de travail).

La seconde

En seconde, on débarque. On a beaucoup d’allemand (11 h par semaine !). On ne connaît pas bien le vocabulaire spécifique à l’histoire géo. Et en plus, on n’est pas forcément très bien organisé. Je me souviens avoir traduit des leçons complètes en français parce que je ne comprenais rien… Ça me prenait beaucoup de temps… Et la veille des DS d’histoire, j’étais dans «tous mes états»

Mon cas est un peu particulier, mais en gros je n’ai eu que 3 mois de cours en seconde… De longue date, j’avais planifié mon échange : je suis partie de janvier à mars et ma correspondante est venue d’avril à juin. Je reparlerai de mon échange plus loin.

En revenant en avril, mes camarades commençaient à partir à leur tour en Allemagne. Petit-à-petit ma classe s’est vidée. Et, on ne faisait plus grand chose en cours…

La première

Après les grandes vacances, me voici en première : l’année la plus cool. On a déjà assimilé pas mal de vocabulaire et on n’a pas la pression de l’Abitur.

La terminale

On arrive en terminale… et c’est encore pire qu’en seconde ! Non seulement la charge de travail reste très importante, mais en plus les enseignants nous mettaient une pression de malade : pour le taux de réusssite, mais aussi pour battre la promo précédente en terme de moyenne (ce qui nous amenait à plus de 15 de moyenne à l’Abitur !).

Certaines leçons font plus de 10 pages typographiées. On ne peut pas tout apprendre (même si il y aura toujours des gros masos qui vont tout apprendre, mais c’est inutile !).

Si vous êtes LV2 et avez peur d’avoir un niveau d’allemand trop faible, sachez que la personne qui a été major de ma promo (qui a obtenu la meilleure note lors des examens) était LV2 au départ.

Comment est-on évalué en Abibac ? On passe toutes les épreuves en français et en allemand ?

Il faut être bien accroché pour comprendre le système. Je dois vous avouer qu’avant ma terminale je n’avais pas tout compris.

On passe les épreuves normales du baccalauréat français, sauf 3 :

  • l’écrit d’histoire géo
  • l’écrit d’allemand LV1
  • l’oral d’allemand LV1

Ces 3 épreuves sont en allemand. Les écrits ont lieu fin mai début juin. L’oral se déroule fin juin début juillet.

L’épreuve d’histoire géo en allemand

Comme pour le baccalauréat en France, l’épreuve d’histoire géo est composée d’un sujet majeur et d’un sujet mineur. La majeure est une dissertation, la mineure une étude de document (une carte est aussi possible en géographie).

L’écrit d’allemand

Pour cette épreuve, on a 2 sujets au choix :

  • sujet littéraire (= literarisches Thema) : sur l’une des œuvres étudiées au cours de l’année de terminale
  • question spécifique (= Sachthema) : sur l’un des thèmes abordés au cours de la première et la terminale. Les sujets sont variés, pour ma part : les minimalistes, la RDA, les Mülltrenner (ceux qui se nourrissent dans les poubelles des supermarchés, etc.)

Chaque sujet est un commentaire guidé (ou aussi une sorte de dissertation pour le Sachthema) : en gros 4 questions que l’on développe à fond. Elles portent tant sur le fond que la forme, certaines cherchent un point de vue.

L’oral d’allemand

On reçoit un texte (les enseignants essaient tant que possible de donner un Sachthema si on a pris le sujet littéraire à l’écrit et vice-et-versa). 30 min de préparation pour 3-4 questions. 30 min de passage : 15 min d’exposé et 15 minutes de questions.

Et comment obtient-on la note finale ?

Chacune des 4 épreuves est notée sur 15 (15 étant la note maximale). L’histoire et la géographie sont deux notes distinctes.

Il faut savoir que pour l’histoire géo, une partie est en contrôle continu. Je pense que c’est pour l’épreuve mineure. On fait la moyenne entre la note de l’épreuve et les 2 meilleures notes obtenues dans l’année. Par exemple, si l’épreuve mineure est la géographie, on fera la moyenne entre ma note à l’épreuve de géo et mes 2 meilleures notes en géo au cours de ma Terminale.

Le total de ces 4 épreuves donne un total sur 60 points qui est ensuite converti sur 900 points.

La moyenne des épreuves au baccalauréat sur 20 est elle aussi convertie sur 900.

On fait la moyenne de ces deux moyennes, et on obtient un nombre de point sur 900, qui est ensuite transformé en notation allemande (de 1 à 6 – 1 étant la meilleure note-).

Vous avez compris ? Non ? Ne vous inquiétez pas, il faut 3 ans pour l’intégrer (et encore…) !

Seul point vraiment important : on ne passe pas d’épreuve en français pour l’histoire géo, donc si, comme moi, vous êtes en ES, vous aurez un coef. 5 sur une épreuve passée en allemand !

Faut-il vraiment faire un échange ?

Par échange, on entend échange Brigitte Sauzay : 3 mois en Allemagne et le(la) correspondant(e) vient 3 mois en France. En effet, mon établissement n’accepte désormais plus les échanges Voltaire (6 mois en Allemagne, puis 6 mois en France), car ils posent trop de problèmes.

Nous sommes plusieurs dans ma classe à avoir gardé contact avec notre correspondant. Mais pour certains d’entre nous l’échange s’est moins bien passé. Je pense que le fait d’être loin de ses parents pendant 3 mois doit jouer pour certains ainsi que le manque d’ouverture sur une autre culture. Pour moi, c’était plutôt le fait de se côtoyer 24/7. On connaÎt tout de la vie de l’autre, mais au bout d’un moment, c’est trop.

Malgré ce côté qui peut faire « peur » de l’échange, je recommande réellement d’en faire un. Les avantages sont multiples :

  • ouverture sur une autre culture (en l’occurrence la culture allemande)
  • bond en avant dans ses capacités linguistiques
  • se faire de nouveaux amis (ça dépend quand même des cas… moi, à l’école personne ne me parlait ☹️)
  • découvrir d’autres choses auxquelles on ne penserait pas forcément : j’allais régulièrement skier (j’étais à la frontière autrichienne), j’allais à la gym avec ma corres, ou encore aborder un type d’enseignement particulier (je me rendais dans une école Waldorf)

Mon point de vue sur l’Abibac

Je tiens à préciser que j’ai obtenu mon Abitur mention TB, tout comme mon baccalauréat.

Je vais premièrement reprendre les points pour lesquels l’Abibac est vanté.

Un niveau d’allemand exceptionnel ?

On est censé acquérir un très bon niveau d’allemand (B2/C1). Ma mère est enseignante d’allemand et évalue plutôt mon niveau à du B1/B2. D’autres ont terminé réellement avec un très très bon niveau d’allemand, et certains avec un niveau plus médiocre…

En ayant seulement 3 mois de cours en seconde, j’ai loupé toute la partie sur la révision de la grammaire et de la conjugaison (on en refait quand même ensuite, mais les bases sont posées en seconde). C’est vraiment ce qui m’a manqué pour progresser davantage.

Et, comme je l’évoquais récemment, si on ne poursuit pas dans un cursus avec de l’allemand, on le perd très rapidement.

Connaissance de l’Allemagne

Il est vrai qu’on acquiert quelques notions sur la civilisation et les institutions politiques et sociales lors des cours. En histoire, nous avons dû apprendre le fonctionnement de la République Allemande par exemple.

Les connaissances en littérature me font rire… Oui, on connaît 4 auteurs quoi ! Enfin, 4 livres plus exactement. Mais je ne dirais pas que ce sont de réelles connaissances en littérature, loin de là.

La connaissance de l’économie, je ne sais pas du tout où ils ont été la chercher…

Pour ce qui est des mentalités et des modes de vie, je pense avoir appris cet aspect lors de mon échange et non pendant des cours.

L’histoire géographie, mais laquelle ?

Avoir les cours en Allemand pour l’histoire et la géographie est certes intéressant, mais reste parfois problématique. On parle avec des amis d’un événement ou de nom de personnes… Eux emploient les termes ou les noms français… et nous ne les connaissons pas… On connait uniquement les termes ou les noms allemand. Un exemple : la Dolchstoßlegende qui est la légende du coup de poignard dans le dos.

En mode prépa

Dès l’entrée en seconde, on nous a mis en avant les classes préparatoires (CPGE) de mon lycée. Et en Abibac, on est vraiment sur un mode prépa : des listes de vocabulaire de 200 mots à apprendre du lundi pour le mercredi, une pression constante pour battre l’année précédente, etc.

Parfois, c’est vraiment énervant. Dans ma promo, on s’entraidait beaucoup. Mais je sais que certaines promos précédentes (ou suivantes) sont beaucoup plus divisées. Il peut y avoir des concurrences, ou des clans dans la classe.

On a même eu droit à une intégration : une reconstitution de la bataille de Marathon, opposant les secondes aux premières et terminales.

Les Abibac, l’élite du lycée

Certains considèrent l’Abibac comme une secte.

Dans mon lycée, les Abibac -comme les prépas- achètent un sweat-shirt avec le « logo » de la promo devant et un surnom par personne au dos (voir la photo en tête d’article).

«Tel jour, on met tous nos sweats !» Notre promo ne l’a jamais fait, mais au cours des années précédentes cela se faisait de manière récurrente ! «Et du coup à midi on mange tous à la même table !» On est en Abibac, autant rester entre nous, sans mélanger les torchons et les serviettes !

C’est un peu ce côté que nous reprochent les autres élèves avec raison : les Abibac restent entre eux. Certains Abibac parlent même allemand entre eux afin de ne pas se « mélanger ». En plus, le sentiment d’être supérieur car on est en Abibac vient vite !

De plus, je n’aime pas vraiment le terme d’intello, mais je n’en vois pas d’autre. Quand quelqu’un s’exclame d’un air hautain « Ah, mais toi, tu ne sais pas ça ?« , ça m’énerve. On ne peut pas tous tout savoir. Qui d’ailleurs sait tout sur tout. Plutôt de t’étonner que quelqu’un ne sache pas telle ou telle chose, explique-lui !

Je ne veux pas dire que ma promo était parfaite, mais j’ai quand même l’impression que nous avions moins ce côté élitiste, que nous étions plus ouverts sur les autres. Toutefois, nous n’étions pas indemnes… Selon les organisateurs des soirées Abibac, les «étrangers» n’étaient pas les bienvenus.

Et du coup tout le monde part étudier en Allemagne après ?

Même pas une dizaine d’élèves est partie en Allemagne après l’Abibac. Beaucoup sont entrés en prépa dans mon lycée. D’autres sont à la fac (j’ai croisé un ex-Abibac sur le campus de Lille 1 la dernière fois, il prépare un DUT). D’autres font des écoles plus spécialisées (architecture, audiovisuel, etc.).

Et au final, ce n’est pas simple, semble t-il, d’étudier en Allemagne après son Abibac : «Ah oui non mais Là c’est du vrai allemand avec du vocabulaire de juriste c’est puissant !!!»

Et pour tout vous avouer, plus d’un élève d’Abibac est désormais dégoûté de la langue allemande ou de l’Allemagne… c’est triste, mais c’est comme ça !

Selon mes informations, il semblerait, après un entretien avec un parent de plusieurs enfants en Abibac dans une autre ville, que mon exemple n’est pas « solitaire », loin de là !

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