Haguenau : bilan des rythmes scolaires….

À Haguenau, la Ville et les parents d’élèves ont tiré les premiers enseignements de la réforme des rythmes scolaires, mise en place à la rentrée 2014. Les avis sont, sans surprise, partagés mais la fatigue des écoliers est unanimement observée.

L’absentéisme redouté du mercredi matin n’a pas été observé

En janvier 2014, l’organisation purement scolaire avait été établie, actant la demi-journée supplémentaire du mercredi matin, un décalage de quinze minutes entre les horaires des écoles maternelles et élémentaires, l’heure d’entrée à l’école retardée et celle de sortie avancée, une durée minimale de pause méridienne de deux heures et l’harmonisation des horaires des écoles desservies par un service de transport. Le tout « en respectant les spécificités de chaque école » — sachant qu’Haguenau en compte vingt (treize maternelles, sept élémentaires). « Ce travail de concertation en amont a permis de désamorcer des situations conflictuelles », se souvient Pierre Fenninger, adjoint au maire en charge de l’Éducation. Même si l’élu reconnaît qu’à la rentrée dernière, « il y avait, a minima, une angoisse chez les parents. Et une résignation chez les enseignants. »

Après un automne marqué par quelques mobilisations du collectif « gilets jaunes » (principalement dans les écoles Schloessel et Musau), Pierre Fenninger a remarqué que l’ambiance s’était « apaisée » à partir de Noël. Et un an après la mise en route des nouveaux rythmes scolaires, les équipes de la Ville en ont tiré un premier bilan « plutôt satisfaisant », même si des ajustements ont été nécessaires en cours de route, notamment concernant l’accueil du matin des enfants de maternelle. L’arrivée directement dans les locaux scolaires pour les petits déposés de bonne heure avait dès le départ soulevé des critiques… « qui n’ont pas cessé », reconnaît volontiers Michel Wendling, directeur général adjoint des services de la Ville : « L’idée était d’éviter la rupture en changeant de lieu, mais ça n’a pas fonctionné — sauf à Marienthal. Alors à part là-bas, l’accueil du matin se fera à nouveau au périscolaire. »

Une pièce de repos demandée en élémentaire

Dans la colonne des « bonnes surprises » en revanche, l’absentéisme redouté du mercredi matin n’a pas été observé. « Et concernant les nouveaux horaires, les parents ont plutôt apprécié que l’école commence moins tôt, entre 8 h et 8 h 30 », commente Pierre Fenninger. Mais, un peu moins qu’elle finisse encore plus tôt, comme l’explique Cindy Jung-Hentz, la responsable haguenovienne de l’Apepa (Association des parents d’élèves de l’enseignement public en Alsace) : « L’école élémentaire termine à 11 h 30 et 15 h 30, et 11 h 45 et 15 h 45 en maternelle. […] Il est difficilement concevable pour des parents qui travaillent de trouver un arrangement professionnel permettant d’être à la sortie de l’école, chose qui était davantage possible lorsque la classe terminait à 16 h 10. »

Ville et parents d’élèves se rejoignent sur un constat : la fatigue des enfants « à partir du jeudi ». « Des enseignants font malheureusement le même constat concernant la difficulté pour les apprentissages, ajoute Cindy Jung-Hentz. La différence de rythme s’est faite ressentir très rapidement, dès les vacances de la Toussaint. Les journées de certains enfants étant au périscolaire sont bien longues, de 8 h, voire plus tôt, à 18 h 30. » Des parents d’élèves ont ainsi demandé l’ouverture d’une pièce de repos dans chaque école élémentaire.

Le doute plane ainsi sur l’efficacité de la réforme qui souhaitait améliorer le rythme des semaines en raccourcissant les journées et en ajoutant une matinée de cours, temps où les enfants sont plus concentrés. En classe, on a dû s’adapter, « en enseignant les matières fondamentales plutôt le matin, détaille Pierre Fenninger, et en réservant l’après-midi à des activités plus légères comme le jardinage ou les arts plastiques ». En maternelle, « entre l’heure d’arrivée des enfants, la pause pipi, le goûter, la cour de récréation et la sortie à 11 h 45, ils n’ont pas vraiment de temps pour travailler », nuance-t-on du côté de l’Apepa : « Sitôt une activité commencée, il faut s’arrêter pour passer à l’étape suivante. Et tout cela a empiré l’état général d’énervement des enfants. »

Côté périscolaire, la Ville se félicite d’avoir « pu répondre à toutes les demandes, car le nombre d’enfants était finalement nettement inférieur à celui estimé » — suite au questionnaire distribué aux parents en avril 2014. Le nombre de places a été augmenté de 10 % à 15 % « grâce à la mutualisation des locaux et des équipes » — les animatrices et assistantes éducatives. Le temps et la capacité d’accueil ont par ailleurs été augmentés pendant les vacances scolaires. Seul bémol : l’absence de périscolaire dans les maternelles des Pins, Saint-Joseph (« Il n’y a pas de demande », explique-t-on à la Ville) et Schloessel (« Il y avait cinq enfants inscrits au maximum »).

Une facture conséquente

Mais tout cela a un coût pour la collectivité : « autour de 400 000 euros » — les assistantes éducatives travaillent plus longtemps et ne font plus l’entretien des locaux (il a fallu les remplacer par du personnel d’entretien), il y a une journée de transport en plus, etc. En compensation, la commune a reçu 140 000 euros de fonds d’amorçage versés par l’État. Et pour la facture des parents ? « L’équilibrage peut se faire si l’enfant était déjà en périscolaire le mercredi matin ou chez une assistante maternelle, observe-t-on à l’Apepa, mais pour tous ceux qui avaient une parenté qui s’en occupait le mercredi, il y a bien un coût supplémentaire. » Et de rappeler que la gratuité d’activités périscolaires (au bon vouloir des communes) n’a jamais été à l’ordre du jour à Haguenau. « La prime donnée par la CAF pour l’année écoulée a été utilisée pour payer le ménage et le chauffage du mercredi matin », affirme-t-on à l’Apepa. De son côté, la Ville de Haguenau souligne qu’elle investit depuis longtemps dans des activités sportives et culturelles à destination des écoliers.

« Le bilan de la première année est donc très mitigé et plutôt négatif pour la majorité des parents », conclut Cindy Jung-Hentz. Mais la responsable de l’Apepa locale convient qu’« évidemment [les parents n’ont] pas assez de recul. Alors laissons le temps au temps… » Nombreux à s’être résignés, les parents n’ont pour le moment pas prévu de ressortir leurs gilets jaunes pour la rentrée.

DNA du 31/7

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